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Oui à une vraie protection des animaux, non aux droits de l’homme pour les singes

Le 13 février 2022, l’initiative cantonale «Droits fondamentaux pour les primates» sera soumise au vote dans le canton de Bâle-Ville. Elle vise à octroyer à tous les singes – pas seulement aux primates – le droit à la vie et à l’intégrité physique et mentale. Des idéaux très respectables en théorie, mais bien peu réalisables dans la pratique. Le Zoo de Bâle explique en quoi les singes pâtiraient d’une loi qui interdirait de peser le pour et le contre dans l’intérêt des animaux.

Les primates, appelés singes dans le langage courant, sont un ordre de mammifères. Selon de nouvelles découvertes, ils sont apparus il y a environ 75 millions d’années, au temps des dinosaures. À l’époque, l’ordre des Primates se distinguait de celui des Léporidés et des Rodentiens. Lapins, souris et rats sont donc les plus proches parents des singes. Il existe une très grande diversité de singes. On connaît aujourd’hui plus de 500 espèces de primates, la plus petite étant le microcèbe de Mme Berthe. Il pèse quelque 30 g et ressemble à un rongeur. À l’extrême opposé, le gorille des plaines de l’Ouest, avec ses imposants 200 kg, représente l’espèce la plus grande. Nous autres humains sommes également des primates. D’un point de vue phylogénique cependant, les liens de parenté entre les hommes et les lémuriens (qui sont certes des promisiens, mais des primates quand même) ne sont pas plus nombreux qu’avec les souris.

La structure sociale des singes

La plupart des espèces de singes vivent en groupes dont l’organisation varie énormément. Dans certains systèmes, ce sont les mâles qui dominent, dans d’autres les femelles et dans d’autres encore des couples. Chez d’autres espèces, les jeunes restent longtemps auprès de leurs parents et participent à l’éducation des plus petits. On trouve même des organisations dans lesquelles le mâle ou la femelle quitte le groupe, laissant le partenaire restant vivre toute sa vie dans le groupe de naissance. Chez certaines espèces, le mâle et la femelle s’en vont tous les deux. Certains singes sont solitaires, d’autres ne se réunissent que rarement en groupe, tandis que d’autres enfin sont territoriaux ou se limitent à des espaces vitaux bien définis. Très variée, la structure sociale au sein de l’ordre des Primates n’est pas comparable au système social humain.

Les droits de l’homme pour les singes?

Le 13 février 2022, l’initiative cantonale «Droits fondamentaux pour les primates» sera soumise au vote dans le canton de Bâle-Ville. La population bâloise sera amenée à décider si tous les singes – c’est-à-dire les primates mais aussi les lémuriens comme le microcèbe de Mme Berthe – doivent disposer de certains droits humains fondamentaux. Concrètement, il s’agit du droit à la vie et du droit à l’intégrité physique et mentale. Bien que l’initiative ne concerne que les singes détenus par des organismes publics, le directeur du Zoo, Olivier Pagan, met en garde contre un probable effet tiers indirect: «À l’heure actuelle, nous sommes responsables de nos singes et prenons toutes les décisions en pesant soigneusement le pour et le contre dans l’intérêt des animaux.» Si l’initiative était adoptée, l’analyse de leur bien-être et de leur sécurité ne relèverait non plus de biologistes, vétérinaires et soignants expérimentés, mais d’un(e) médiateur(rice) ou d’un soutien – voire de juristes non qualifiés. Nous ne pouvons adhérer à une telle proposition.

Personne ne connaît mieux nos singes que nos collaborateurs(rices). La façon dont nous les élevons est d’ailleurs régulièrement contrôlée par les services vétérinaires du canton de Bâle-Ville.»

Pour le conservateur Adrian Baumeyer, l’initiative va clairement à l’encontre de la loi suisse sur la protection des animaux, laquelle impose aux éleveurs d’épargner à leurs animaux toute souffrance, toute anxiété et toutes douleurs injustifiées. L’approbation de l’initiative posera problème dès lors qu’un animal souffrira mais qu’on ne pourra pas mettre fin à ses souffrances sous couvert du droit à la vie dont il dispose. «Aujourd’hui, nous avons le droit d’endormir un animal malade afin d’abréger ses souffrances», explique Adrian Baumeyer. «Le droit humain à la vie empêche le recours à cette solution.» Et Fabia Wyss, vétérinaire du Zoo, de préciser: «Si l’initiative est adoptée et si je décide d’endormir malgré tout l’animal, je me mets hors-la-loi. Mais en laissant souffrir un animal inutilement, je me rends également coupable au sens de la loi sur la protection des animaux.» En cas d’acceptation de l’initiative, difficile de dire donc comment elle devra procéder à l’avenir pour bien faire son travail. Et pourtant, si elle est devenue vétérinaire, c’est bien pour s’engager en faveur du bien-être animal.

Les singes doivent pouvoir rester des singes

Les droits et les obligations ne sont en rien naturels, ils ont été créés par les hommes pour les hommes. Le fait d’accorder des droits aux singes ne contribue ni à leur protection, ni à leur bien-être. Car un singe ne sera jamais en mesure d’exercer ni de faire valoir ses droits par lui-même. Il dépendra toujours d’un être humain qui représentera ses droits. Et si cette personne n’est pas spécialiste de sa cause, il lui faudra compenser son manque d’expertise par de la bureaucratie. L’acceptation de l’initiative n’améliorera donc pas le bien-être des singes. Au contraire, elle ne fera que le dégrader. Selon le Zoo de Bâle, les singes doivent avoir le droit de rester des singes. Comme tous les autres animaux, ils doivent être protégés par des spécialistes compétents qui les accompagnent en leur âme et conscience. «Cette responsabilité, nous ne pouvons et ne voulons pas la déléguer», conclut Olivier Pagan.